Le 19 octobre 2020, Sociétal a eu l’honneur de recevoir Baudoin Roger à l’Institut de France. Au regard des contraintes sanitaires, nous étions six dans la grande salle de Séances et près de 400 participants via zoom et le Facebook Live que j’animais dans le cadre du partenariat qui lie Sociétal et Newpolis, l’association de grandes écoles et universités que j’ai co-créée.
Convaincu que la liberté d’entreprendre est indispensable pour résoudre certains des défis les plus importants de notre époque, le directeur général de l’Institut de l’Entreprise [1] défend la contribution des entreprises à l’intérêt général et prône une meilleure intégration de la RSE dans leur stratégie. En se basant sur ses observations de la situation actuelle des entreprises, Paul Allibert dresse les enjeux futurs du capitalisme.
En premier lieu, il convient de rappeler combien les entreprises ont été à la hauteur pendant la crise et à quel point leur capital-confiance est même en croissance dans l’opinion publique, comme le démontre un sondage ELABE publié en septembre 2020 dernier. Elles se sont imposées comme des acteurs fiables et sont intervenues en appui des pouvoirs publics pour mettre en place des solutions utiles pour tous, qu’il s’agisse de GEODIS, Air Liquide, Total, L’Oréal, LVMH ou Accor. Ces actions, œuvrant en faveur de l’intérêt général, ont devancé toute réquisition étatique et sont allées au-delà des attentes de la société.
En second lieu, la crise a été l’occasion d’accélérer la modernisation des entreprises. Ces dernières ont été en mesure de procéder dans l’urgence, en quelques jours, à des transformations d’ampleur attendues depuis des années (mise en place de nouveaux outils et process, déploiement du travail à distance). Le défi des dirigeants est désormais d’anticiper les transformations à accomplir pour être prêts lorsque la prochaine crise surviendra.
Enfin, la crise a permis d’en finir avec un certain nombre de faux semblants, clarifiant ainsi plusieurs éléments de contexte. La mort de l’alliance transatlantique a été confirmée, il a été démontré que le multilatéralisme n’était plus d’actualité, que l’OMC n’était plus au rendez-vous tandis que les échanges internationaux étaient freinés. Les basculements perçus comme potentiels se sont installés dans le paysage. La pandémie et le confinement ne sont donc pas à l’origine de nouvelles tendances mais constituent des points de rupture. Une autre page a été tournée : celle d’une vision des entreprises comme des entités préoccupées par la défense des seuls intérêts des actionnaires. Nous sommes désormais dans une ère Post-Friedmanienne et nous savons que les bénéfices de l’entreprise sont multiples : financiers certes, mais aussi, économiques, sociaux, sociétaux et qu’ils sont durables lorsqu’ils font l’objet d’un compromis authentique entre les parties prenantes.
Les entreprises sont également entrées dans une ère « post-RSE », non pas en se détournant de celle-ci, mais en l’intégrant de manière plus significative à leur stratégie et à leurs objectifs, y compris financiers. Plutôt qu’un « monde d’après », il est préférable d’évoquer un « monde d’avec », une période transitoire d’accélération sans retour en arrière possible.
Paul Allibert, Directeur général de l'Institut de l'Entreprise
[1] L’Institut de l’Entreprise est une association qui s’est donnée pour mission, dès sa création en 1975, de valoriser, le rôle et la place de l’Entreprise dans la société. Au fil du temps, celle-ci s’est transformée en une plateforme réunissant 4 pôles d’action : l’Institut de l’Entreprise contribue à la compréhension de l’Entreprise et à la valorisation de son rôle dans la société ; la revue Sociétal aide à décrypter les grandes tendances socio-économiques ; l’Institut des Hautes Études de l’Entreprise forme les leaders de toute la société française aux enjeux actuels et futurs de l’entreprise dans la globalisation ; et le programme Enseignants-Entreprises rapproche le monde de l’enseignement et celui de l’entreprise, en partenariat avec l’Éducation Nationale.