Alors que KLESIA est devenue une entreprise à mission en juin 2020, son directeur général, Christian Schmidt de La Brélie, explique que 50% de la part variable de la rémunération des membres du comité exécutif dépend de critères extra-financiers « en relation directe avec l’intérêt général de l’entreprise ».
Propos recueillis par Margaux Terranova
SOCIÉTAL.- Quand avez-vous défini la raison d’être de KLESIA ?
Christian Schmidt de La Brélie.- La raison d’être et la mission de KLESIA ont été définies en 2019, par nos conseils d’administration, et inscrites dans nos statuts, lors de l’assemblée générale de juin 2020. Nous sommes ainsi devenus une entreprise à mission dans le sens statutaire du terme.
Cette démarche en faveur de l’intérêt général n’est pas nouvelle. Nous nous définissons d’ailleurs comme un « assureur d’intérêt général », car au travers de nos différents métiers, que ce soit la gestion des retraites (1,7 million de retraités accompagnés), l’assurance de santé (3,6 millions de personnes couvertes) ou l’action sociale (40 millions d’euros chaque année), nous agissons en faveur de l’intérêt général.
Notre métier s’inscrivant dans une vision long terme - l’assureur de personnes, que ce soit en retraite ou en prévoyance, doit se projeter sur des dizaines d’années - les notions de durabilité, comme de prise en compte de nos parties prenantes font partie de notre ADN. Cette vision de long terme se prête particulièrement à la définition d’une raison d’être.
Le vrai changement inhérent à l’entreprise à mission est que désormais, nos engagements non financiers sont opposables. Et cela fait toute la différence avec les entreprises n’ayant défini qu’une raison d’être, sans pour autant devenir entreprise à mission.
Quelle est la raison d’être de KLESIA ?
« Garantir un avenir serein et contribuer à la qualité de vie pour tous », et elle est associée à une mission : « Protéger en apportant des solutions de prévention, d’assurance de personnes et de services, simples, innovantes, solidaires et durables, adaptées à vos besoins et à ceux de vos proches, tout au long de la vie. »
Elle est donc en droite ligne avec le métier de KLESIA, l’assurance de personnes. Il était important pour nous de garantir cette cohérence, car si les Français considèrent qu’il est pertinent que les entreprises s’engagent en matière d’intérêt général, ils considèrent dans le même temps qu’elles doivent le faire en lien avec leurs champs d’expertise et de légitimité.
Concrètement, KLESIA se mobilise, depuis longtemps déjà, sur des sujets d’intérêt général comme l’inclusivité et l’emploi, mais aussi le bien vieillir ou l’aide aux aidants, la santé et la qualité de vie au travail. Nous nous sommes également engagés dans une démarche RSE, dès 2012. Pour nous, l’objectif est de créer de la valeur économique, qui soit elle-même créatrice de valeur sociale.
KLESIA, comme partenaire privilégié de ses entreprises clientes, considère également de sa responsabilité de les aider à répondre à ces enjeux, en leur apportant son expertise et ses compétences en la matière.
Si les Français considèrent qu’il est pertinent que les entreprises s’engagent en matière d’intérêt général, ils considèrent dans le même temps qu’elles doivent le faire en lien avec leurs champs d’expertise et de légitimité.
Comment, concrètement, avez-vous défini votre raison d’être ? Avec quelles parties prenantes ? Avez-vous également défini des indicateurs pour en mesurer l’impact ?
Notre force est d’avoir des conseils d’administration paritaires composés de représentants des employeurs mais aussi des salariés, qui possèdent une vision entrepreneuriale mais aussi une vision sociale. La raison d’être a donc été définie par ces conseils, sur la base de travaux préparatoires menés par une équipe multi-directions. Par ailleurs, une entreprise à mission se doit de définir des objectifs et indicateurs associés à sa raison d’être, ce que nous avons bien entendu fait chez KLESIA. Une commission en charge de l’intérêt général est responsable d’assurer le suivi de ces objectifs et indicateurs. Tout cela est très codifié et c’est précisément ce changement d’échelle en termes d’obligations qui fait du passage à l’entreprise à mission un signe très fort d’engagement de la part des entreprises qui s’y soumettent. Il ne s’agit plus seulement de dire, ni même de faire, mais de prouver ce que nous faisons !
Le fait de vous définir officiellement comme entreprise à mission a-t-il changé quelque chose pour KLESIA ?
J’en suis convaincu, dans le sens où cet engagement est porteur de sens pour les salariés, comme pour l’extérieur. Nous en voyons déjà quelques bénéfices.
Par exemple, nous avons vu progresser la fierté d’appartenance de nos salariés.
Selon une enquête réalisée en mai 2020, nous sommes passés de 66% de collaborateurs fiers de travailler chez KLESIA, en 2019, à 89%, en 2020.
Cet engagement est porteur de sens pour les salariés, comme pour l’extérieur. Nous en voyons déjà quelques bénéfices. Par exemple, nous avons vu progresser la fierté d’appartenance de nos salariés.
Comment comptez-vous mobiliser vos parties prenantes internes autour de l’entreprise à mission et votre démarche d’intérêt général ?
Nous avons intégré des critères extra-financiers dans la part variable de la rémunération des membres du comité exécutif.
La moitié de ces critères est individuelle, l’autre moitié collective, comme par exemple, le maintien ou l’amélioration du taux de salariés en situation de handicap dans le groupe. Ce critère est commun à tous parce qu’il doit être appliqué dans toute l’entreprise.
Les critères individuels sont quant à eux rattachés aux champs de compétences. Ce sont des critères extra-financiers qui dépendent de chaque membre du comité exécutif, donc plus orienté « client » pour l’un, comme plus orienté « RH » pour l’autre, ou encore « achat », etc.
Ce type de démarche est l’un des meilleurs moyens pour faire de l’intérêt général le projet de tous. Dans le cadre du Cercle de Giverny, nous avons formulé des propositions allant dans ce sens, comme indexer 50% de la rémunération variable des dirigeants sur des objectifs mesurables de la RSE – ce que nous faisons donc chez KLESIA - ou encore insérer de manière explicite dans les accords d’intéressement (de l’entreprise ou de la branche professionnelle) des objectifs d’inclusivité (égalité homme/ femme, ratio d’équité, handicap, etc.) et de développement durable. Il s’agit d’impliquer l’ensemble des acteurs de l’entreprise afin de renforcer l’adhésion des salariés.
Donc cela veut-il dire que la rémunération aussi devient multicritères ? On passe d’une performance qui se veut globale à une rémunération qui l’est également ?
C’est exactement cela ! Là-dessus, nous sommes novateurs. Quand je vois, par ailleurs, la place croissante de ce qu’on appelle les « investissements à impact », le poids de la notation extra-financière, cela ne me semble pas contradictoire par rapport à l’avenir de la valorisation des entreprises.
Quelle est l’étape d’après pour KLESIA ?
Poursuivre son engagement en matière d’intérêt général comme entreprise à mission. Cette dimension est au coeur de du nouveau plan stratégique Ambition 2024 qui sera voté à l’assemblée générale de juin prochain. Dans le contexte de crise sanitaire, économique et sociale que nous traversons, il est plus que jamais crucial de maintenir le cap, à un moment où les difficultés économiques pourraient au contraire inciter certaines entreprises à réduire la voilure.

