La PDG du Groupe RATP revient sur les transformations qu’a induites la pandémie de la Covid-19 pour le secteur de la mobilité. Catherine Guillouard rappelle également les quatre objectifs essentiels poursuivis par la politique d’innovation du Groupe RATP : l’amélioration de l’expérience client, l’accélération du leadership industriel, l’amélioration de l’environnement de travail des salariés et la construction de la ville du futur.
SOCIÉTAL.- Comment vous êtes-vous adaptés aux contraintes imposées par la pandémie mondiale – réorganisation de l’offre, baisse de la fréquentation ? Quelles transformations majeures perdureront ?
Catherine Guillouard.- Comme de très nombreux secteurs, le transport public a été frappé de plein fouet par la pandémie de la Covid-19 : pour le Groupe RATP, la pandémie a entraîné une brusque baisse du trafic. En Ile-de-France, au plus fort de la crise sanitaire, la fréquentation sur nos lignes a pu baisser de 95%. Au total, sur l’ensemble de l’année 2020, le trafic voyageur francilien est en baisse de 43% par rapport à 2019. Et à l’heure actuelle, à la faveur des d.confinements progressifs, la fréquentation sur le métro francilien se situe aux deux tiers de son niveau avant la pandémie. Des tendances similaires ont été observées dans les 13 pays où nous sommes présents : qu’il s’agisse de nos bus à Londres ou du tramway de Casablanca, également exploité par la RATP, la fréquentation s’est établie, en 2020, à 50% de la fréquentation pré-Covid-19. Loin de se laisser abattre par cette crise sans précédent, les 63 000 salariés de la RATP ont été au contraire à pied d’oeuvre, dès le premier jour. Je pense en particulier à celles et ceux en charge de l’opérationnel : je ne compte plus les adaptions d’offre auxquelles nous avons dû procéder pour faire face aux différents confinements et d.confinements inhérents à cette crise exceptionnelle.
Loin de se laisser abattre par cette crise sans précédent, les 63 000 salariés de la RATP ont été à pied d’oeuvre, dès le premier jour.
Grâce à la mobilisation de ses salariés, le Groupe RATP a pu poursuivre sa mission fondamentale de transport public, en particulier pour celles et ceux qui étaient en première ligne : ainsi, en Ile-de-France, dès le mois d’avril 2020, en lien avec l’AP-HP et notre autorité organisatrice Ile-de-France Mobilités, nous avons mis en place 22 lignes de bus spécialement dédiées aux personnels soignants.
À plus long terme, et comme vous le soulignez, cette crise terrible aura aussi été un accélérateur de changements pour tout le Groupe. Nous aurons fait la preuve de notre agilité et de notre capacité à modifier nos process industriels en un temps record. C’est le cas en particulier pour la gestion de la propreté de nos espaces et des matériels. Avec Ile-de-France Mobilités, nous avons fortement mis l’accent sur ce sujet, en changeant totalement nos pratiques et le budget alloué. À titre d’illustration, en mai 2020, nous avons généralisé en quelques semaines la nébulisation de nuit des 4 700 bus et 1 300 trains de la flotte, qui n’existait pratiquement pas sur notre réseau fin 2019. Le Groupe RATP a également développé des innovations comme le bouton d’arrêt en forme d’hologramme, expérimenté par notre filiale RATP Dev, ou mis en place en trois semaines une application de crowdsourcing qui avec ses 900 000 contributeurs permet de donner à chaque client le taux de chargement des rames.
Le Groupe RATP a également développé des innovations comme le bouton d’arrêt en forme d’hologramme
Plus largement, la crise sanitaire nous a amenés à réinventer la relation avec nos clients-voyageurs, d’abord pour les protéger face à la pandémie. En Ile-de-France, en lien avec l’État et avec notre autorité organisatrice, nous avons ainsi proposé un « pacte voyageur . : ce pacte retraçait nos engagements à l’égard de nos clients, en leur demandant en échange de respecter les gestes barrières essentiels sur tout le réseau, y compris la distanciation physique au premier confinement, ce qui était totalement inédit pour un transporteur. En septembre 2020, 75% de nos clients interrog.s estimaient que le Groupe RATP avait une gestion efficace de la crise sanitaire. Nous avons rendu publique en janvier 2021 une charte qui comprend neuf engagements de service que la RATP prend vis-à-vis de tous ses voyageurs, et qui vont de la propreté à la sûreté dans les transports, en passant par l’information voyageurs ou aux solutions alternatives de mobilité.
Et vous-même, comment et d’où avez-vous piloté vos équipes ? Que restera-t-il de ses nouvelles habitudes ?
La crise a été un test de résilience pour moi-même, l’équipe dirigeante et les équipes sur le terrain. La gestion de la crise est à la fois un exercice collectif et de précision tant les problèmes à régler étaient nombreux. Cet esprit d’équipe nous a été précieux car nous sommes parvenus à gérer la crise au quotidien sans sacrifier l’exécution de notre plan stratégique. L’équipe dirigeante se réunissait tous les jours en conf call pour faire le point sur la crise sanitaire, tout en inventant des solutions pour permettre la continuité de notre activité, avec comme boussole la sécurité de nos salariés et de nos clients. C’est dans l’adversité que l’on se révèle : je crois sincèrement que cette crise aura encore davantage soudé l’équipe de direction du Groupe RATP.
En outre, dès le déclenchement de la crise sanitaire, j’ai jugé primordial de mettre l’accent sur le partage de l’information et la transparence sur la situation inédite et complexe que nous traversions. C’est dans cette perspective que dès le début de la crise, une réunion virtuelle de notre top management avec les 600 cadres de l’entreprise a été mise en place : ces web-conférences se tenaient environ tous les quinze jours. Elles avaient pour objectif principal de faire un point sur la situation sanitaire, l’opérationnel, les relations sociales, les innovations en cours pour améliorer l’expérience client… Elles permettaient également de répondre à toutes leurs questions et de faire remonter les sujets, nombreux, qui pouvaient se poser sur le terrain.
Au niveau du Groupe RATP, au cours des derniers mois, nous avons continué d’investir et d’innover pour préparer l’avenir.
Créées pour répondre à une situation d’urgence, ces web conférences sans filtre ont été finalement pérennisées et permettent de partager largement et de façon transparente aujourd’hui l’avancée de notre plan de transformation et de notre plan stratégique.
Est-ce que la crise a eu des répercussions sur le calendrier de vos investissements ?
Rappelons qu’en Ile-de-France, nos investissements sont portés par notre contrat avec la Région et avec notre autorité organisatrice Ile-de-France Mobilité (IDFM). La crise n’aura pas eu d’impact sur le montant de ces investissements grâce à une mobilisation exceptionnelle de nos équipes, notamment de maîtrise d’ouvrage des grands projets. Au contraire : les investissements ont augment. de 3,4% entre 2019 et 2020, pour s’établir à 2,2 milliards d’euros l’année dernière, en tenant compte de ceux réalisés pour le compte de la Société du Grand Paris, avec le prolongement Sud de la ligne 14 (400 M€). Au total sur l’année 2020, les investissements ont représenté près de 40% de notre chiffre d’affaires consolidé au niveau du Groupe.
Grâce à cette dynamique d’investissements, nous avons pu continuer les travaux d’extensions de quatre lignes de métros (4, 11, 12 et 14) pour environ 1 milliard. Nous avons ainsi réalisé un petit exploit avec le prolongement de la ligne 14 vers le Nord, qui a été mise en service en décembre 2020, conformément à nos engagements. Ce prolongement, c’est 5,8 km de tunnels et quatre stations, qui mettent la mairie de Saint-Ouen à 15 minutes de la gare Saint-Lazare. Et je puis vous assurer que ce prolongement était attendu par les quelque 100 000 habitants qu’il dessert, mais aussi par les centaines de milliers de voyageurs de la ligne 13, que ce prolongement doit désaturer. Nous avons également investi 1,2 milliard d’euros dans la modernisation des matériels roulants, la rénovation de nos centres bus et l’achat de bus biogaz ou électriques ou encore la rénovation des stations.
Cette trajectoire va se poursuivre et s’amplifier pour les ann.es à venir, sur la base du nouveau contrat pluriannuel que nous venons de signer avec Ile-de-France Mobilités. Ce contrat repose en effet sur un volume sans précédent d’investissements de 8,4 milliards d’euros en quatre ans, en croissance de 24% par rapport au contrat précédent, pour notamment développer l’offre à hauteur de 1,9 milliard, moderniser les réseaux (4,4 milliards) et améliorer la qualité de service (600 millions d’euros). En particulier, ce contrat prévoit un investissement massif dans le renouvellement du matériel roulant, tant sur le RER B, sur le métro que sur les tramways.
Enfin, au niveau du Groupe RATP, au cours des derniers mois, nous avons continué d’investir et d’innover pour préparer l’avenir. Ainsi, en novembre 2020, nous avons fait de la crise une opportunité en rachetant Mappy. Avec ses 12 millions de visiteurs mensuels, Mappy est le troisième acteur de la mobilité du quotidien dans notre pays, après Google et Waze. Grâce à cette acquisition, le Groupe RATP se positionne pour devenir le leader français du Mobility as a Service (MaaS). Pour nous, le MaaS vise à proposer aux voyageurs une expérience de mobilité totalement renouvelée, à la fois digitale, multimodale et sans couture.
La crise vous a-t-elle laissé apercevoir de nouvelles priorités, de nouveaux chantiers ?
Engagé au service de la ville de demain, notre groupe ne peut qu’être extrêmement attentif aux préoccupations exprimées par ses habitants, qui aspirent plus que jamais à une ville à la fois plus intelligente et plus durable.
Cette exigence de durabilité, nous l’intégrons pleinement par notre engagement à réduire de moitié notre empreinte carbone, en 10 ans de 2015 à 2025.
Ainsi en Ile-de-France, malgré la crise, nous avons continué à convertir massivement nos 4 770 bus et nos 25 centres-bus vers des énergies propres, électrique, bioGNV ou hybrides. À l’heure actuelle, plus de 30% de notre parc est équipé en bus propres, cinq de nos centres bus sont convertis au bioGNV ou à l’électrique et sept sont en cours de conversion.
Mais cet effort de réduction de notre empreinte carbone concerne également les autres villes où le Groupe RATP est actif : par la proportion de sa flotte convertie . l’électrique (25% en 2022), RATP Dev London doit ainsi devenir le premier opérateur de transports publics propres à Londres. Nous sommes également les seuls à Paris à proposer via Toot Bus une expérience de sightseeing avec une flotte de bus propres.
Engagé au service de la ville de demain, notre groupe ne peut qu’être extrêmement attentif aux préoccupations exprimées par ses habitants.
Par ailleurs, il apparaît clairement que la crise sanitaire a largement favorisé l’essor des nouvelles mobilités. Ces nouvelles mobilités, notre groupe les accompagne : via notre filiale RATP Capital Innovation, nous avons pris des participations dans des start-up d’autopartage, de location de scooters, de covoiturage, de parkings connectés. Et via notre nouvelle application « Bonjour Ratp », vous pouvez désormais réserver et payer un VTC Marcel ou un Velib, et à l’automne, des trottinettes avec Tier.
J’ajoute que ces nouvelles mobilités constituent à nos yeux un réel front d’innovations. Nous travaillons à construire avec Aéroports de Paris, Choose Paris Region et la DGAC une filière française de la mobilité aérienne urbaine, autour d’un objectif clair : disposer d’un démonstrateur de taxi volant pour les Jeux Olympiques à Paris en 2024.
Pour le Groupe RATP, les nouvelles mobilités sont avant tout complémentaires du transport public de masse. Extrêmement utiles, notamment pour la « mobilité dernier kilomètre » elles ne sauraient toutefois se substituer au mass transit, qui va demeurer la colonne vertébrale de la mobilité en ville.
Quel a été l’impact sur le chiffre d’affaires du groupe ? Êtes-vous optimiste sur la reprise de la mobilité ?
Au 31 décembre 2020, le chiffre d’affaires consolidé du Groupe RATP s’établit à 5,52 milliards d’euros, contre 5,7 milliards d’euros fin 2019. L’impact net de la Covid-19 sur notre chiffre d’affaires a été de 414 millions d’euros. Malgré un plan de réduction de coûts de 300 millions, l’impact de la crise sanitaire sur le résultat net a été de 356 millions, conduisant le Groupe à afficher, pour la première fois, un résultat net négatif à -134 millions.
Comme l’indique très justement votre question, notre performance en 2021 va largement dépendre de la reprise des transports publics.
Cette reprise est conditionnée par plusieurs facteurs externes à notre entreprise. La crise sanitaire a eu trois effets : un niveau de télétravail élevé partout dans le monde, une forte augmentation du commerce digital et un effondrement du tourisme. En France, le télétravail a été multiplié par 2,6 et la part du e-commerce dans le commerce de détail est passée de 9,9% en 2019 à 13% en 2020. À Paris, le tourisme s’est effondré de près de 80%. De ce fait, nous estimons que la demande de transports publics devrait s’établir à près de 90% de la fréquentation pré-Covid, à l’horizon 12-24 mois en région parisienne.
Les nouvelles mobilités constituent à nos yeux un réel front d’innovations.
La situation à l’international revient progressivement à des niveaux de 80% de la période pré-Covid-19. Face à ces facteurs externes, je demeure cependant optimiste, eu égard aux efforts que nous faisons pour rassurer nos clients, en leur montrant chaque jour qu’ils peuvent emprunter nos lignes en toute sécurité : c’est dans cette perspective que nous avons imposé le port du masque ou que nous avons consacré un effort conséquent au nettoyage et à la désinfection. J’aimerais par ailleurs rappeler que les études scientifiques faites dans le monde entier, dont celle de Santé publique France, montrent que les transports publics ne sont pas source de cluster.
Comment l’innovation se conçoit-elle au sein du Groupe RATP ?
La politique d’innovation du Groupe RATP doit servir quatre objectifs essentiels : améliorer l’expérience clients, accélérer notre leadership industriel, améliorer l’environnement de travail de nos salariés et construire la ville du futur.
Compte tenu des priorités que je viens d’évoquer, la RATP mène actuellement 162 projets innovants, autour de 12 technologies-clés, en suivant plusieurs champs d’application, comme par exemple la mobilité autonome et partagée, l’intelligence artificielle (I.A.), le Building Information modeling ou les objets connectés. Nous avons un portefeuille de 179 partenaires dont 75% sont des industriels, 13% des startups et 12% des académiques. Depuis 2016, notre Groupe a mené, par exemple, plus de 100 expérimentations autour du véhicule autonome ; que ce soit en Ile-de- France ou en régions, environ 100 000 passagers ont été transportés par nos navettes autonomes. Autre champ d’application, l’industrie 4.0 : outre l’utilisation d’exosquelettes par certains de nos salariés, nous mobilisons également l’intelligence artificielle pour la maintenance prédictive de notre matériel roulant. En particulier, l’utilisation de l’I.A. pour prévenir les pannes sur nos portes de RER se traduit par une baisse de 20% des incidents d’exploitation.
La RATP mène actuellement 162 projets innovants, autour de 12 technologies clés.
L’innovation à la RATP vise aussi à améliorer l’expérience client. Au-delà du lancement de notre nouvelle application, déjà évoquée, j’aimerais citer les nouvelles solutions de paiement, qui permettent de recharger votre pass Navigo sur smartphone en Ile-de-France ou encore la bague connectée développée avec la start-up Icare, qui pourra contenir votre carte bancaire et des données billettiques, et que nous allons tester sur le réseau de Brest. Autre l’exemple, une information voyageur renouvelée avec un usage de l’intelligence artificielle pour traduire instantanément en plusieurs langues les messages diffusés en situation perturbée sur le réseau.
Comment vous préparez-vous à fin du monopole prévue pour fin 2024 et à l’ouverture à la concurrence des lignes de bus ?
Le Groupe évolue depuis près de 20 ans dans un monde très concurrentiel, via sa filiale RATP Dev ENTREPRISES qui avec ses 20 000 salariés est présente dans 13 pays et sur les 4 continents.
La mise en concurrence de notre réseau historique à Paris est le fruit d’une loi de 2009, adoptée en application d’une directive européenne. Elle est donc inéluctable. Tout notre projet de transformation vise . pr.parer l’entreprise . la fin du monopole qui va concerner d’ici la fin de 2024, 18 000 salariés de l’activité bus, en attendant plus tard ceux du tramway et du réseau ferré.
Il s’agit d’un changement économique et culturel majeur. Nous mettons ainsi en place des business units, pourvues d’un chiffre d’affaires et d’un pilotage par la marge pour créer une dynamique entrepreneuriale au sein de l’activité réseau de surface. Il en est de même pour nos activités de sureté ou de gestion des infrastructures qui sont désormais régulées. À l’exception des appels d’offre sur les lignes 16 et 17 du Grand Paris Express où RATP Dev s’est allié avec le singapourien Confort Delgro, nous répondrons aux appels d’offre en région Ile-de-France avec une équipe expérimentée celle de notre filiale dédiée « Cap Ile-de-France ».
Au-delà de notre capacité à proposer les meilleures offres de mobilité demain pour les territoires, j’ai engagé dès mon arrivée en 2017, une stratégie de relais de croissance fondée sur des savoir-faire existants au sein du groupe dans l’énergie, l’immobilier, la logistique urbaine, les télécommunications ou encore les nouvelles mobilités. Pour ce faire, le Groupe RATP peut s’appuyer sur son expertise centenaire de la ville et de ses espaces. C’est le rôle dévolu à notre nouvelle filiale « solutions villes » en charge de ces activités.
La transformation du Groupe RATP s’opère dans la plus grande transparence vis-à-vis de nos salariés et de leurs représentants et avec un cadre social clair et des garanties.
La loi d’orientation des mobilités de 2019 prévoit en particulier la portabilité des droits sociaux pour les salariés concernés par d’éventuels transferts automatiques d’activités liés aux appels d’offre, mais aussi un Cadre Social Territorialisé (CST) qui reconnait la spécificité du métier de conducteur de bus à Paris et en petite couronne.
Quelle est votre vision des transports urbains de demain à l’aune espérée d’un capitalisme plus inclusif ? Partagez-vous la conception de Philippe Aghion d’un capitalisme responsable et vert s’appuyant sur un triptyque vertueux « État/Entreprise / Société civile » ?
J’aimerais d’abord souligner que le transport public urbain est un secteur à forte intensité capitalistique : pour en rester au cas de la RATP, que ce soit avant ou après la crise sanitaire, nous réinvestissons chaque année environ 40% de notre chiffre d’affaires, que ce soit pour entretenir nos infrastructures, prolonger les lignes de métro ou moderniser nos espaces. Sur cette base, je crois profondément que le transport public incarne un capitalisme à la fois écologique et inclusif. En témoigne, au niveau de la RATP, la conversion industrielle massive, d’ici à 2025, de nos bus et centresbus vers des énergies propres pour 1,4 milliard d’euros. Notre secteur est également profondément inclusif par ses retombées économiques, qui bénéficient à un large tissu d’entreprises : en 2020, 61% des fournisseurs de la RATP étaient des petites et moyennes entreprises (PME).
Je me reconnais donc parfaitement dans les conceptions défendues par Philippe Aghion. En particulier, je le rejoins sur l’importance du rôle de la puissance publique : que ce soit aux États-Unis ou au Royaume-Uni, les transports publics ont fait l’objet de soutiens massifs de l’État. En France, l’État a injecté 3,4 milliards d’euros en 2020 dont 1 milliard au titre du plan de relance.
Le transport public incarne un capitalisme à la fois écologique et inclusif.
Je rejoins également Philippe Aghion sur le rôle de la société civile : une entreprise comme la nôtre exerce ses missions en relation étroite et quotidienne avec les syndicats, les fédérations d’usagers, les associations de consommateurs… Je précise également qu’au cours de l’année 2020, malgré la pandémie, la RATP a tenu à expliciter clairement son rôle dans la soci.t. en d.finissant sa raison d’être, « S’engager chaque jour pour une meilleure qualité de ville ». L’élaboration de cette raison d’être s’est appuyée sur un dialogue nourri avec toutes nos parties prenantes, internes comme externes sur une base de 138 000 contributions démontrant que la crise n’avait en rien atteint notre capacité à nous projeter dans l’avenir.
À plus long terme, j’estime comme Philippe Aghion que la sortie de crise doit emprunter le chemin d’un capitalisme responsable et durable. C’est tout le sens d’une tribune que j’ai signée dès mai 2020, avec une centaine de dirigeants d’entreprises (1). Résolument engagé pour la transition écologique, le secteur des transports publics mesure en outre pleinement sa responsabilité, qui est à la hauteur de son poids dans l’économie et de son empreinte environnementale : à l’échelle de l’Europe, les transports publics représentent entre 130 et 150 milliards d’euros et ils emploient jusqu’à deux millions de personnes.
À ce titre, je me réjouis que par la mobilité durable, notre secteur figure en bonne place dans le Green Deal proposé par la Commission européenne au printemps 2020. Faisons définitivement de cette crise sanitaire un accélérateur de modernisation et de verdissement de nos activités de transports publics urbains, pour notre bien commun.
(1) Jean-Laurent Bonnafé, Catherine Guillouard et al., « Mettons l’environnement au coeur de la reprise économique », Le Monde du 3 mai 2020
Biographie de Catherine Guillouard
Née en 1965, Catherine Guillouard est diplômée de l’ENA et de Sciences Po Paris. Elle est également titulaire d’un DESS de droit communautaire.
Catherine Guillouard est nommée présidente-directrice générale de la RATP le 2 août 2017.
Catherine Guillouard siège au conseil d’administration d’Airbus depuis 2016. Sa reconduction à la tête de l’entreprise intervient après son audition par l’Assemblée nationale et le Sénat les 3 et 9 juillet 2019, dans les conditions prévues par l’article 13 de la Constitution. Les deux assemblées s’étaient prononcées en faveur de la nomination de Madame Guillouard. Le conseil d’administration de la RATP, réuni en séance extraordinaire le 23 juillet 2019, avait au préalable proposé au Gouvernement la nomination de Catherine Guillouard comme présidente-directrice générale de la RATP.
En avril 2020, Mme Guillouard est devenue membre du Conseil de surveillance de KPN, l'un des principaux fournisseurs de télécommunications et d'informatique, leader du marché aux Pays-Bas.