Selon la présidente d’IBM France, l’entreprise a un rôle crucial à jouer dans la formation et l’insertion dans l’emploi des jeunes. Parce que le déploiement de P-TECH est un succès notable, Béatrice Kosowski plaide pour un rapprochement du monde de l’éducation et du monde de l’entreprise pour « mieux préparer les élèves aux métiers d’aujourd’hui et de demain ».
SOCIÉTAL.- Quelle est la motivation et l’ambition d’une entreprise comme IBM en matière d’éducation ?
Béatrice Kosowski.- Nous faisons aujourd’hui face à un paradoxe sur le marché du travail : les entreprises peinent à recruter, en particulier dans le secteur du numérique, car elles ne trouvent pas les compétences dont elles ont besoin. Parallèlement, en France, encore trop de jeunes ont du mal à s’insérer sur le marché du travail et à trouver un emploi.
Nous avons donc un défi collectif à relever. Et je pense que les entreprises ont un rôle crucial à jouer. C’est important aussi parce que le monde de demain ne peut pas se construire en laissant de côté tout une partie de nos concitoyens. Il faut que tout le monde puisse y trouver sa place.
Sur ces sujets, l’objectif d'IBM est ambitieux : nous nous sommes engagés à contribuer à la formation de 30 millions de personnes d'ici 2030 dans le monde. En plus du programme P-TECH, nous avons créé IBM SkillsBuild, qui offre des parcours d'apprentissage en ligne gratuits et interactifs, pour donner les compétences nécessaires dans la vie professionnelle, qu’il s’agisse de compétences techniques ou comportementales.
Quelles perspectives en France pour les partenariats publics-privés en matière d’éducation ?
C’est assez simple : en rapprochant le monde de l’éducation et le monde de l’entreprise, nous pouvons mieux préparer les élèves aux métiers d’aujourd’hui et de demain.
Nous avons souhaité être pragmatiques et travaillons étroitement avec le ministère de l’Éducation nationale sur ces sujets.
Quand les entreprises s’impliquent dans les lycées professionnels, elles viennent soutenir les équipes pédagogiques via du mentorat, des visites sur site, des sessions de découverte des métiers... L’idée est de le faire dans le cadre d’un dialogue étroit et dans la durée avec les équipes des lycées, pour s’adapter au mieux et le plus possible aux besoins des élèves.
C’est un des principes du programme P-TECH créé par IBM aux Etats-Unis en 2011 et lancé en France en 2019 aux côtés de BNP Paribas et d’Orange, aujourd’hui rejoint par plus d’une dizaine de partenaires.
P-TECH, lancé il y a quelques années, est-il une réussite ? Serait-il possible de changer d’échelle et, en ce cas, comment s’y prendre ?
Dans le monde, P-TECH a été adopté dans des centaines d'écoles et dans des dizaines de pays en collaboration avec des centaines d'entreprises.
Le premier bilan de l’expérimentation en France montre un impact très positif sur la motivation des élèves et leurs compétences, en cohérence avec les enjeux de transformation de la voie professionnelle.
Dans la continuité de ce premier succès, je suis ravie de l’annonce récente d’une nouvelle étape du déploiement de P-TECH en France : 9 lycées et 12 partenaires intègrent l’initiative. Cela porte à 10 le nombre de projets P-TECH en France, répartis sur une grande partie du territoire.
Il est tout à fait possible de passer à l’échelle, sous le pilotage du ministère de l’Education nationale, qui a d’ailleurs affirmé souhaiter voir naître 100 projets du type de P-TECH dans les prochaines années.
Le potentiel est immense : avec 100 entreprises partenaires, nous pourrions accompagner plus de 10 000 élèves. Je me réjouis que des organisations professionnelles comme Numeum dans le secteur numérique s’impliquent désormais dans P-TECH pour aider à déployer le programme.
Enfin, un enjeu majeur reste pour nous de progresser sur la présence des filles dans ces classes P-TECH. C’est un problème plus large concernant l’ensemble les métiers du numérique et c’est en amont, dès l’école et le collège, qu’il faut l'adresser.